mardi 8 février 2011

Deux risques industriels majeurs : Sains-en-Gohelle et Ajka.

Un risque majeur est une menace pesant sur un grand nombre de personnes et de biens (les enjeux). Le risque repose sur une situation géographique particulière et la possibilité qu'un aléa (évènement imprévu naturel ou lié à l'activité humaine) survienne. Il y a deux sortes de risques majeurs :

-les risques naturels (liés à des phénomènes naturels comme les inondations ou les séismes, par ici).

-les risques technologiques (liés aux activités humaines, et dans lesquels on peut placer les marais noires ou les accidents industriels). Certains risques sont imprévisibles à court terme : on ne peut pas prévoir des semaines à l'avance un tsunami (raz-de-marée produit par un séisme sous-marin). Mais la plupart peuvent faire l'objet d'une importante prévention, afin de minimiser les dégâts lorsqu'une catastrophe arrive.

1-Un risques technologique majeur : Sains-en-Gohelle (Pas-de-Calais).
La commune de Sains-en-Gohelle est soumise à deux formes de risques. Un risque naturel d'inondations par remontée des nappes phréatiques (survenues en 1998 et 1999) et de coulées de boue. Un risque technologique lié aux activités de l'industrie chimique (production, transport). Pour consulter la fiche de la commune sur le portail Prim.net, par ici.

La situation géographique :

Sains-en-Gohelle est en partie longée par la A 21 (Rocade minière) sur laquelle peuvent circuler des camions de transports chimiques. La route nationale 937 et l'autoroute A 26, toutes proches, peuvent aussi être sources de risque. La commune est surtout située à cinq kilomètres au sud-ouest de Mazingarbe, qui possède une importe plateforme chimique (Grande Paroisse) classée Sévéso seuil haut (présentant un risque majeur -pour plus de détails, par ici), similaire à l'usine AZF de Toulouse (détruite par une explosion le 21 septembre 2001, par ici). Cette situation rend la commune vulnérable.


L'aléa : un incident technique au sein de l'usine (explosion, fuite) couplé à un vent de Nord.

Les enjeux : un enjeu humain (Sains compte plus de 7000 habitants, menacés par le déplacement d'un nuage toxique) et matériel (l'onde de choc que provoquerait une explosion endommagerait les bâtiments).

La prévention : au collège Jean Rostand, elle est assurée par une information régulière sur les risques industriels, en conformité avec l'article L312-13-1 de la loi du 17 août 2004 modernisant la Sécurité civile. Le SPPPI Artois (dit S3PI, Secrétariat permanent pour la Prévention des pollutions industrielles) organise régulièrement des conférences dans les écoles primaires et au collège (ainsi, le 6 janvier 2011 pour toutes les classes de 5e de Jean Rostand). L'information à l'endroit des parents passe par les élèves et par la distribution de plaquettes. La prévention passe aussi par un entraînement régulier. Le PPMS (Plan particulier de mise en sûreté) prévoit des salles-refuge tout au long du couloir central, dans lesquelles les élèves et les professeurs sont invités à se confiner lorsqu'ils entendent l'alarme. Des simulations de confinement ponctuelles permettent de s'entraîner.

En cas de catastrophe : il faut respecter les consignes nationales de sécurité. Lorsque l'alarme modulée retentit, les élèves sont confinés au sein du collège. Les parents ne doivent pas appeler le standard de l'établissement afin de ne pas saturer les lignes téléphoniques. Ils ne doivent pas venir chercher leurs enfants.


2-Une catastrophe industrielle majeure : Ajka (Hongrie).


La situation géographique : le réservoir n°10 de la décharge de Magyar Alumínium ZRt – MAL contient des résidus hautement toxiques issus du traitement de la bauxite, entre autres de la soude caustique, du fer, de l'alumine, du silicium, du sodium, du calcium, du titane, du manganèse, du vanadium, du chrome hexavalent, du plomb et du cadmium (métaux lourds). Le cumul de tous ces métaux et minéraux fait des boues de couleur rouge un déchet toxique pour l'homme, la faune aquatique, les animaux domestiques et d'élevage. Ce réservoir se situe sur la commune d'Ajka, à proximité de six autres communes importantes dans un rayon de quarante kilomètres, et à proximité du Raab, un affluent indirect du Danube.


L'aléa : l'effondrement d'un des murs du réservoir.

Les enjeux : Les communes voisines sont très peuplées (Devecser compte 5400 habitants). La région vit de l'agriculture (on trouve de nombreuses terres cultivées). Proche du Danube, elle possède un ecosystème riche, protégé par deux sites classés Natura 2000. A plus petite échelle, une pollution de la région pourrait toucher les eaux du Danube et polluer toute la vallée en aval, jusqu'aux pays limitrophes (la Croatie, Serbie, la Bulgarie, la Roumanie, la Moldavie et l'Ukraine) sur plus de 2000 kilomètres. Cette pollution pourrait avoir des conséquences humaines importantes :

-certains produits corrosifs contenus dans les boues (notamment la soude caustique) peuvent brûler les organes externes et internes par contact, ingestion et inhalation (poussières rouges).

-les métaux lourds peuvent se retrouver dans les eaux de surface ou les nappes phréatiques, les végétaux et les animaux, finissant pas contaminer l'homme au bout de la chaîne alimentaire.

La prévention : elle a été très faible, malgré les alertes des ONG environnementales européennes et les condamnations dont la société MAL a fait l'objet pour remplissage excessif de son réservoir. L'entreprise n'a pas entrepris les travaux d'entretien nécessaires. Dilligentées par l'état, des inspections des murs de rétention ont eu lieu, donnant à chaque fois un avis favorable d'exploitation. Ni l'entreprise, ni l'état hongrois, ni l'Union européenne ne semblent avoir joué un rôle préventif efficace. La justice hongroise va devoir determiner les responsables de la catastrophe.

La catastrophe : le 4 octobre 2010 à 13 h 30, le mur Ouest du bassin cède. 700 000 mètres cube de boues rouges se déversent sur les communes alentour, dont les plus touchées sont Kolontar et Devecser. On déplore dix morts et plus de 150 blessés. A Devecser, 250 maisons sont détruites. 1000 hectares de terres cultivables sont submergées par au moins trente centimètres de boue. Dès le 9 octobre, on relève d'importantes traces de boues toxiques dans l'affluent local du Danube (des centaines de poissons morts flottent en surface).
La prise en charge des conséquences :

-A court terme. Après un court temps de flottement (notamment avec le risque d'une seconde rupture du réservoir le 8 octobre), les autorités décrètent l'état d'urgence dans la région (prolongé jusqu'au 31 mars 2011). Ils évacuent la population des sept communes. Les blessés sont pris en charge par les secouristes. L'armée, les pompiers et des civils volontaires nettoient les rues au karcher (au risque de précipiter la boue dans les égouts et jusque dans les eaux fluviales par ruissellement). Un mur de secours est rapidement érigé autour du bassin afin d'éviter une seconde coulée.

-A plus long terme. L'usine MAL est jugée responsable de la catastrophe mais ne veut pas interrompre son activité. Le réservoir reçoit à nouveau des déchets toxiques. Le directeur du site explique qu'il ne peut cesser le travail : avec 1100 salariés, MAL est le plus gros employeur industriel local. L'État compte obtenir de sa part une forte indemnisation. Pour l'instant, beaucoup de personnes non assurées ont tout perdu. Certains habitants reviennent déjà occuper les lieux et sauver ce qui peut l'être, malgré des risques de contamination toxique (notamment l'inhalation de la poussière issue de l'assèchement des boues sur les sols et les murs) .

Pour aller plus loin :

Le rapport de l'Association Robin des bois, par ici

Un bon article du Figaro sur l'état de la région deux mois après la catastrophe.

Ce montage vidéo constitué de différents extraits de reportages télévisés (France 2, France 3) montre bien l'ampleur de la catastrophe et l'étendue des dégâts humains et environnementaux.

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